Société civile et rénovation de la vie publique

 

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X-Sursaut, en association avec Tribunes de l’X et l’Observatoire des think tanks, organise le lundi 6 mars 2017 à 18h30 à la Maison des Polytechniciens (12 rue de Poitiers, Paris 7), un débat sur la société civile comme source de la rénovation de la politique, dans le contexte de la présidentielle de 2017.

Introduction :
Laurent Daniel (X96), Président de X-Sursaut
Jean-Claude Javillier, Président de  l’Observatoire Européen des Think Tanks
Samuel Pilcer (X2015), Président de Tribunes de l’X

1) Table ronde 1 : quelles formes d’engagements de la société civile en politique ?
Guillaume Labbez animateur de Droite Lib, le nouveau mouvement de la droite libérale et progressiste largement issu de la société civile  (en attente de confirmation)
Emmanuel Constantin (X2009, référent départemental d’En Marche, et cofondateur du Think-Tank la Gauche Libre)
Hervé Novelli, membre du Coonseil National de la Société Civile placé auprès de François Fillon
Olivier Urrutia (Directeur Général de l’Observatoire Européen des Think Tanks) les think tanks acteurs du renouveau de la politique.

Table ronde animée par Vincent Martigny  Cevipof, enseigne l’histoire politique française à l’X et anime l’émission « L’atelier du pouvoir » sur France Culture chaque semaine


2) Table ronde 2 : quelles initiatives de la société civile remplacent l’action des politiques ?

July Coudry (fondatrice et dirigeante de Jobmaker)
Alexandre Jardin (fondateur et animateur de Bleu, Blanc, Zèbre)
Antoine Petat (président et fondateur de Looking for talents)
Nicolas Sadirac (cofondateur de l’Ecole 42)

Table ronde animée par Stéphane Marchand (X80), Rédacteur en chef, ParisTech Review

Compte-rendu provisoire du débat

Table ronde animée par Vincent Martigny  Cevipof, enseigne l’histoire politique française à l’X et anime l’émission « L’atelier du pouvoir » sur France Culture chaque semaine

Paradoxe : on ne souhaite pas que la politique soit un métier, en en même temps la politique devient de plus en plus complexe. Cela pose le problème du renouvellement.

Emmanuel Constantin (X2009, référent départemental d’En Marche, et cofondateur du Think-Tank la Gauche Libre)

En marche est un mouvement politique où l’on s’engage dans un projet, des idées, des valeurs. Ce n’est pas juste un laboratoire de la société civile. Oui l’échec individuel des politiques joue pour leur rejet, mais le problème est avant-tout systémique. Il faut changer le fonctionnement des partis avec des processus plus ouverts pour accueillir plus largement — tout en gardant une ligne politique qui correspond à un engagement — et le non cumul des mandats dans le temps.

 

Guillaume Labbez animateur de Droite Lib, le nouveau mouvement de la droite libérale et progressiste largement issu de la société civile  (en attente de confirmation)

 

Olivier Urrutia (Directeur général de l’Observatoire européen des think tanks) les think tanks acteurs du renouveau de la politique.

Il y a déjà une difficulté à parler de société civile qui est une notion galvaudée et que l’on peine à bien définir. Néanmoins, on entend souvent par société civile les acteurs du privé par opposition aux pouvoirs publics et comme le gage d’une forme avancée de démocratie. En ce sens, la vision des autres orateurs est trop optimiste, et ne considère les possibilités de renouvellement des élites que comme un problème de personnes. Mais c’est bien plus un problème systémique, qui n’arrive pas à faire émerger de nouveaux profils dans le jeu politique, qu’il faut interroger et faire évoluer. Les primaires, contrairement à ce disent certains des autres intervenants ce soir, ne permettent pas de le faire efficacement, bien au contraire. L’adage dit que le pouvoir corrompt les hommes mais il faudrait ajouter que les hommes, souvent, corrompent le pouvoir. Il ne faut pas croire qu’en changeant juste quelques noms, on changerait profondément les choses. A ce titre, quand on regarde son parcours et ses soutiens, on ne peut décemment pas dire qu’Emmanuel Macron soit véritablement un rebelle qui renouvellerait la classe politique française mais qu’il incarne plutôt la quintessence des relations endogamiques des élites. Et qui nous dit que les personnes de la société civile qui accéderaient au pouvoir ne retomberaient pas dans les mêmes travers que les politiciens actuels ? En effet, il n’existe pas que l’élite politique ; il faudrait également citer les élites économiques, médiatiques et culturelles. La société civile recèle aussi ses élites qui partagent presque toujours les mêmes origines et les mêmes codes sociaux.

Cette endogamie de notre système, sa faculté à fonctionner en circuit fermé, qui explique la sclérose de notre système, dépasse largement le système politique français. On retrouve le même phénomène de cour autour des élites économiques ou médiatiques. L’aristocratie existe dans les conseils d’administration du CAC40, il suffit de regarder les profils et les parcours de vie des leurs membres.

Les think tanks ne jouent pas non plus ce rôle de médiation entre la société civile et les politiques. Les 20 think tanks français les plus connus ne respirent pas la pluralité des profils : la fondation Concorde est présidée par son fondateur Michel Rousseau (ancien élu), la Fondapol  dirigée par Dominique Reynié (prof à SciencePo, commentateur politique, élu puis invalidé) et fondée par Nicolas Bazir, l’Institut Montaigne fondé par Claude Bébéar puis présidé jusqu’à très récemment par Henri de Castres et dirigé par Laurent Bigorne, les trois derniers se retrouvant soit chez Fillon, soit chez Macron, soit les deux ! Cette élite est, pour ce qui concerne le poste de président, à 90% masculine — voire à 100% pour le top 20 français des think tanks — et diplômée d’1 à 2 grandes écoles en plus de l’Université.

Avec les dirigeants de think tanks se pose la question de la multi-positionnalité des acteurs, c’est à dire de la capacité des élites à occuper plusieurs places au sein des grandes entreprises, des médias, des associations, des grandes écoles et des mouvements politiques constituant ainsi un maillage du pouvoir très hermétique et détenu entre quelques mains seulement, souvent les mêmes.

 

 

Hervé Novelli, membre du Conseil National de la Société Civile placé auprès de François Fillon

Recentrage sur la question : la politique doit elle être réservée à des professionnels ?

Penser que la politique est une affaire de professionnels est une erreur profonde et répandue dans la sphère politique, qui génère ce fossé avec la société civile. Reco : il faut légiférer. Exemple de la grande Bretagne : renoncer au statut de fonctionnaire quand on est élu. Alternance administrative aux États-Unis ou au Brésil.

La crise de la démocratie représentative est un autre sujet, même s’il est majeur. L’insatisfaction et le découragement des citoyens sont aussi structurelles, et se traduisent notamment par leur incapacité à intervenir entre deux élections. En particulier la lenteur des prises de décision par la sphère publique les exaspère face à l’accélération des décisions dans la vie privée. [C’est pour cela qu’il faut plus de subsidiarité. ?]

 

 

Questions

  1. Forum Atena. Pour une « informatique anthropologique » beaucoup plus large…
  2. Système vs. personnes : discours de renouvellement chez en marche contrarié par des accords de partis avec le PRG, les Républicains,… « Rumeurs » vivement critiquées par Emmanuel C.
  3. Changement de paradigme pour fédérer les intelligences plutôt que l’individualité : pourquoi ne pas chercher l’unité nationale ?
  4. Désindustrialisation — Laurent D. a mentionné le désintéressement des élites pour les industriels et les PMEs. Contrairement à l’Allemagne
  5. L’angoisse que les élus confisquent le pouvoir n’est pas nouvelle (déjà en 1789…), pourquoi ne pas étendre le plafonnement à toutes les fonctions politiques
  6. La mobilité en circuit fermé : comment ouvrir l’élite au plus grand nombre par un effort d’instruction comme au XIXe siècle. Aller chercher les nouvelles élites dans les banlieues et réparer l’ascenseur social
  7. A l’ère d’Internet ca devrait simple de savoir ce que plein de gens pensent sur les sujets de la vie quotidienne
  8. Le tirage au sort des députés pour avoir une vraie représentation de la société civile, comme dans la société Athénienne

Emmanuel C. : Pour en marche il y a déjà un léger progrès en introduisant des personnes qui ont exercé dans des postes à responsabilité dans le privé. Moralisation et prévention des conflits d’intérêts. Aller chercher la diversité géographique, non diplômés, féminine.  Les partis et les syndicats étaient l’école des politiciens. Le travail de terrain est essentiel pour savoir ce que les gens pensent. Sur le numérique fort scepticisme, car les gens les plus éloignés de l’élite sont moins numérisés. La loi sur le numérique a montré la limite (des élus ?) sur ces sujets.

Guillaume L.On a les capacités avec la techno à réinventer la façon de co-construire, avec des outils qu’on utilise tous déjà à la maison. On pourra mettre le citoyen au centre de la vie politique, en permanence. Le tirage au sort, …. sont pleins de trucs à imaginer, mais ce n’est pas l’urgence. Le numérique permettrait d’aller beaucoup plus vite. Sur le cumul des mandats dans le temps n’est pas suffisant cf. Poutine

Olivier U.: Comme le disait Hervé Novelli juste avant, le renouvellement des élites pourrait s’appuyer en partie sur les principes « spoil system / revolving door », c’est-à-dire d’une plus grande porosité entre les secteurs public et privé. Le problème comme je l’ai déjà évoqué en préambule, tient aux similitudes entre élites politiques et élites de la société civile : par exemple, si Henri de Castre devenait ministre après avoir présidé AXA et l’Institut Montaigne, cela correspondrait-il véritablement à un renouvellement ? Et nous dans cette salle — Parisiens, sur-diplômés — sommes pour la plupart la représentation même d’un système jacobin rousseauiste qu’il faut changer [Critique à Olivier U. « oui mais qu’est ce que tu proposes ? »] Il est triste de constater que l’université, et notamment le titre de docteur d’Etat, au pays d’Abelard et de la Montagne Sainte-Geneviève sont fort déconsidérés. Les systèmes politique et économique donnent peu de place aux universitaires alors même que la recherche requiert des compétences tout à fait spécifiques et constitue une valeur ajoutée incontournable dans un monde régi par l’économie du savoir.

Quant à la mise en place de procédés qui iraient vers plus de démocratie justement, encourageant davantage de participation de tous les acteurs de la société civile, je m’interroge. D’abord parce qu’il est quasiment impossible d’offrir une égalité d’accès et de participation à tous les citoyens – cela ne reste qu’une théorie libérale souvent relayée par les anglo-saxons – et d’autre part parce la transparence du parrainage des candidats à la présidentielle voulue par le parti socialiste non seulement infantilise les élus locaux mais autorise également les mises sous contraintes de ces mêmes élus dans leur choix de parrainage. En d’autres termes, cela ne va pas vers plus de démocratie.

 

Hervé N. On n’échappera pas à imposer des règles, un cadre pour organiser ce renouvellement du personnel politique. Le fonctionnement collaboratif est majeur, et une chance pour régénérer le système politique : une information égale pour tous, et la capacité à ne plus décider seulement au sommet. Cela aura un impact sur les modes de désignations de nos dirigeants : les forces émergents de l’économie collaborative.

Résumé par Hervé N. On a besoin de réformer notre système de représentation. Plus de fluidité public – privé : ca passe par des règles et des lois. pour réduire le fossé. Limitation des mandats électifs. Mais attention à la motivation des élus : le système pousse le député à être utile. Tirage au sort ? Mais attention c’est l’échec avant tout qui crée le besoin de changement

 

Quelles initiatives de la société civile remplacent l’action des politiques ?

Table ronde animée par Stéphane Marchand (X80), Rédacteur en chef, ParisTech Review

Dans quelle mesure la société civile peut-elle remplacer les politiciens sans tomber dans les pièges du populisme ? Comment dans un pays extraordinairement fossilisé dans ses méthodes politiques peut-on faire émerger 577 députés ?

Philippe Rodriguez (Coordinateur de la campagne 577 pour la France)

Au démarrage de cette initiative Jean-Christophe Fromentin, député maire de Neuilly, raconte qu’il s’est engagé en politique par déclic en réalisant un jour qu’il ne savait plus pour qui voter. Lui qui était entrepreneur, alors à la tête d’une société d’un cinquantaine de personnes, réalise que la séparation entre les politiques et le reste de la société qu’on appelle « civile » ne devrait pas exister. Chacun d’entre nous devrait pouvoir prendre part à la vie citoyenne. C’est ainsi qu’il se présente aux législatives (où il échoue), puis à la mairie de Neuilly. Tout le monde a cherché à le décourager dans cette entreprise, lui expliquant que ce n’était pas le fonctionnement « habituel » de la politique et qu’il n’y avait pas de place prévue pour un entrepreneur. Et finalement il s’est présenté, a été élu et est devenu député par la suite.

577 est né de l’idée que ce que Jean-Christophe Fromentin a fait était possible pour d’autres. Nous avons répliqué et « gamifié » le modèle qui l’avait fait gagner pour tous les candidats à une candidature. Contrairement à la plupart des systèmes nous n’avons pas de comité d’investiture. Nous vous demandons de franchir vous-même une à une les étapes vers la candidature. Etape 1 vous devez trouver 100 supporters prêts à faire campagne avec vous : si vous avez du mal à trouver 100 personnes pour tracter avec vous le week-end ce n’est pas la peine de vous engager. Etape 2 vous devez trouver des amis prêts à financer votre campagne à hauteur de 2000€ : si personne autour de vous n’est prêt à faire un chèque de 25€ parce qu’ils croient à votre candidature, il vaut mieux rester chez soi. On va mener ainsi un petit nombre de nos 1000 candidats à la candidature qui sont de simples citoyen à démarrer leur campagne. Aujourd’hui ils sont 120 candidats, qu’on réunit une à deux fois par mois pour les former de façon à avoir un corpus d’idées et un projet commun. Autour de 6 idées fortes, ils restent indépendants, et vont pouvoir renouveler l’assemblée nationale avec des talents divers venant des territoires : entrepreneurs, huissiers, commissaires, professeurs…

Nous ne croyons pas à l’arrivée d’un homme providentiel pour faire que cette démocratie fonctionne. Malheureusement les faits nous donnent raison : une fois le président élu, la vraie bataille des idée se mène à l’assemblée nationale, et c’est là que les citoyens doivent etre représenté comme indiqué dans la constitution, encore faut-il qu’on aide les citoyens à devenir députés. C’est ce que nous faisons. [questions à poser sur les compétences, les transferts, comment on leur enseigne le fonctionnement de la fonction de député]

Cette démarche est-elle réservée aux députés ? A priori non, mais pour les plus hautes fonctions de l’Etat une proportion de personnes de la société civiles au sein de l’exécutif semble avoir du sens. Néanmoins l’exécutif soit bien connaitre les rouages de l’Etat et avoir un vrai sens politique. La démarche des 577 n’est pas d’isoler un candidat pour l’élection présidentielle. L’endroit où les citoyens ont le plus de possibilité d’infléchir la politique de la France c’est à l’Assemblée Nationale, à travers les amendements et les allers retours avec l’exécutif. C’est cette chambre qui doit représenter la nation. L’expérience de Jean-Christophe Fromentin pourra être répétée avec un groupe d’indépendants à l’Assemblée Nationale, ou au moins avec des indépendants capables de voter rationnellement en fonction des projets et des contrats de législature qu’ils auront avec les citoyens. Jean-Christophe Fromentin a voté la loi Macron, en dehors de tout système partisan, alors qu’il est plutôt à droite. Il est insupportable de voir des députés qui par la discipline du vote se retrouvent à voter contre leur conscience

Julie Coudry (fondatrice et dirigeante de Jobmaker, ancienne présidente de la confédération étudiante)

Julie Coudry s’est beaucoup occupé il y a une dizaine d’année de l’emploi des jeunes lorsqu’elle était à la tête de la confédération étudiante. Elle a mené des campagnes pour l’insertion professionnelle des étudiants — aujourd’hui inscrite dans la loi — ou contre le contrat première embauche ou pour améliorer la performance des 45.000 agents de pole emploi. Déjà à l’époque elle était persuadée du rôle fondamental de la société civile, et notamment des mouvements représentant la jeunesse, d’être l’interlocuteur du politique pour l’aider à se remettre en question et à évoluer. Mais après des années d’engagement elle réalise que ses résultats sont limités — et que la loi sur l’insertion professionnelle des jeunes diplômés n’a pas eu beaucoup d’effets — car la société civile n’est qu’un miroir de la politique, qui considère que c’est au politique de changer la loi.

Peut-être que passer par le politique est une étape en trop, alors qu’il existe un formidable réservoir de potentiel chez tout le monde, que chacun pourrait utiliser pour régler les problèmes qui le concerne, mais qui n’est pas mobilisé aujourd’hui. En premier lieu sur le problème de l’emploi qui concerne chacun et dont nous sommes les premières ressources pour identifier nos compétences et nos envies, pour connaitre le marché et pour savoir se vendre. Autant de capacités que chacun peut développer lui-même, alors que la vision jacobine crée jusqu’ici des mégastructures régies par des lois souvent incompréhensibles, et visent à aider des gens passifs et dépendants, conseillés par des gens débordés, qui n’ont qu’une heure à lui consacrer et qui ont encore moins le temps de se former aux nouvelles mesures et méthodes d’accompagnement. Cette structure est particulièrement inefficace pour faire baisser la courbe le chômage.

C’est là que Julie change complètement de registre, et après plusieurs entreprises, monte JobMaker, un coach de carrière digital qui se substitue d’une certaine manière au service public de pôle emploi. Cette start-up s’est donnée pour mission de développer les capacités individuelles d’une personne pour la faire passer de demandeur d’emploi à offreur de compétences, dans une attitude active de conscience de soi et de ses capacités et de connaissance du marché, en mesure de mobiliser son écosystème pour trouver la bonne place et créer de la valeur.

Aujourd’hui les outils digitaux permettent de diffuser très largement ce type de systèmes, et de mesurer leur efficacité. Il y a dix ans il fallait aider les personnes en face à face, ce qui créait un problème de ressources pour mettre suffisamment de formateurs en face des personnes pour développer leurs capacités. Il y a quelques années Julie avait un cabinet d’accompagnement en transition professionnelle de 35 personnes, capable d’accompagner 2 000 personnes. Pour accompagner 2 millions de personnes ce modèle n’était pas capable de passer à l’échelle : il aurait fallu 35 000 personnes ! C’est pour cela qu’elle décide de s’auto-disrupter grâce au digital, pour permettre à un seul coach digital de carrière d’accompagner des millions de personnes, ce qui était avant le domaine réservé de l’Etat.

Cette substitution est un exemple de ce qui peut être fait par les gens eux-mêmes en développant leurs propres capacités. Mais attention développer des capacités au travers d’un parcours n’est pas juste une histoire de volonté. Proposer un accompagnement méthodologique avec tout un système de gamification, est un discours différent de « tu n’as qu’à te bouger » ! La méthodologie Outplacement digitalisée par JobMaker est internationale et éprouvée depuis 40 ans. En la digitalisant, elle est mise à la portée du plus grand nombre.

Antoine Petat (BNP Parisbas, et président-fondateur de l’association Looking for Talents)

Antoine Petat travaille chez BNP Paribas à garantir la qualité des données sur les ressources humaines de la banque, et en parallèle a fondé il y a 15 ans l’association Looking for Talents.

Antoine a la passion du service public. Depuis très jeune il rêvait d’entrer dans l’armée, mais à son entrée à Saint-Cyr son bizuteur lui demande « Est-ce que servir tu ne peux le faire que dans l’armée ? » Cette question lui fait mal à la tête, et il se rend compte qu’on peut servir bien plus efficacement en tant que simple citoyen ou acteur du privé, que dans le service public.

Nous rencontrons beaucoup de gens qui souffrent sur le marché de l’emploi, et il faut se rendre compte que les ressources humaines constituent une une hyper-expertise : « ce n’est pas parce que çà nous parle qu’on a le droit d’en parler ». D’une part les théories économiques et sociales ne sont pas d’accord pour définir la notion d’offre et de demande d’emplois. D’autre part il y a un problème évident d’interface entre cette offre et cette demande, qui fait qu’aujourd’hui on compte 700 000 postes vacants en France.

Pour conjuguer performance et éthique, Looking for Talents est une association d’experts, fondée il y a 15 ans, dont la clé de voute est une approche industrielle et bénévole. Chacun des bénévoles est un cadre en entreprise qui donne une partie de ses jours de congés à l’accompagnement individuel et industriel. Le travail sur la data extrêmement sérieux : chaque personne qui envoie une candidature soit recevoir une réponse personnalisée. Une attention particulière est portée à l’utilisation et à la valeur prédictive de chaque donnée individuelle qui permet d’affiner le matching. Pour cela Antoine a développé avec une dizaine de professeurs d’université et grâce à son expérience chez BNP Paribas — qui lui permet d’apprendre énormément —  un algorithme qui recherchent les offres et les demandes complémentaires ou isomorphes.

Il accompagne également les entreprises pour apprendre à fixer des critères de sélection qui ne soient pas des barrières, mais de véritables critères business, basés sur les réels besoins de l’emploi. Le terme « mouton à 5 pates » est banni chez Looking for Talents.

Questions

  1. La société civile lorsqu’elle s’organise peut faire pression sur la politique. Le travail de l’association « contribuables associés » a par exemple permis il y a 15 jours de faire voter une loi dont les journaux n’ont pas parlé et qui pourtant va changer profondément la vie politique française puisque cette loi dit que les candidats aux élections doivent avoir un casier judiciaire vierge. Un tiers des députés ne va plus pouvoir se présenter !
  2. Aller retours entre l’assemblée et le Sénat. Serait-il possible de remplacer le Sénat par une assemblée citoyenne qui validerait les lois. Julie : précision sur les institutions, il existe une chambre qui représente la société civile qui est le Conseil Economique & Social (CESE). Mais elle n’a pas de pouvoir législatif — c’est l’assemblée du « premier mot » — et sa représentation est figée avec une proportion d’agriculteurs, de syndicats, de patronats qui ne représente plus forcément la proportion de la société. Philippe : dans le contrat il est proposé de remplacer le Sénat par une Assemblée des Territoires d’environ 450 membres qui représentera le Sénat, composée des patrons des 400 intercommunalités françaises et les patrons de régions. Ce contrat propose également de fusionner le CESE et les CESER pour réduire le mille feuille de décisions, et de réduire le nombre de députés à 400, soit un par intercommunalité. L’objet de cette nouvelle géographie politique est d’avoir de plus grandes métropoles (8) et de plus grands accès à travers des villes moyennes efficaces, dans lesquelles chaque Français pourra se retrouver. Antoine : on constate une rage dans la société due aux institutions qui bien qu’elle évolue influent très peu sur le résultat. Les Français en ont marre d’entendre des speechs incantatoires, qui manquent de concret.
  3. (…) Julie : Cour du roi pleine de gens qui viennent donner des bonnes idées au politique. Anecdote : l’état intéressé par JobMaker propose de l’utiliser gratuitement pour tous le Français, alors que c’est une solution privée qui nécessite un certain investissement. C’est révélateur à la fois de la manière dont le politique voit les acteurs de la société civile, et de la manière dont ces acteurs dont la cour à l’Etat en disant « S’il vous plait écoutez nous ». Alors qu’en fait la capacité d’intervention de ces acteurs est immense. Entre entendre des dizaines de milliers de personnes qui vous disent « j’ai repris le contrôle de ma vie, j’arrive à me vendre et j’ai trouvé un job » et s’échiner à transformer le Pôle Emploi, on se rend compte de la différence d’efficacité entre une politique qui veut tout faire, et ce qu’on est capable de faire en mettant en mouvement les individus.
  4. Mission de la sphère publique ? Chacun en a sa vision. Comment ets-ce qu’on peut avoir un débat efficace. Dans le premier débat la variable cachée etait pourquoi changer le système : pour donner au citoyen lambda que sa voix est écoutée, tout en mettant des frontières contre le front nationale. Chine digues pour éviter la crue du fleuve jaune. Système sclérosé qui bénéficie à des insiders. On ne parle jamais des indicateurs : là dans le privé vous parlez des indicateurs et du résultat, ce dont dans la sphère publique on omet habilement de parler. Est-il utopique de penser qu’on puisse avoir un débat factuel, serein et efficace sur ce genre de question, tout en maintenant le rythme de la vie politique avec son caractère d’urgence perçue. Réponse de Philippe : principe de subsidiarité, quel est l’échelon le plus proche du citoyen pour traiter un problème donné. Ce principe devrait être beaucoup plus haut dans les valeurs politiques françaises, et se demander systématiquement quel est le bon niveau. Sur l’emploi par exemple on voit que l’échelon local est le bon niveau. Antoine : comment pénétrer cet univers de la décision. Le constat de la catastrophe de l’emploi est posé depuis des centaines d’années. J’ai pu parler à des ministres et je trouve consternant à quel point on crie dans le désert et on joue les Cassandre. Il faut qu’on soit meilleurs pour être plus convaincants, et démontrer qu’on répond aux attentes du peuple : leur dire où ils en sont sur le marché de l’emploi, les aider à trouver de la reconnaissance, du positionnement, du réseau social…

Julie : le mot de la fin. En tant qu’ancienne syndicaliste je me suis posé la question comment faire entendre qu’il faut remettre leur sort dans les mains des individus. La bonne solution est de déclarer que l’on une responsabilité individuelle sur son destin, sans les culpabiliser et en leur donnant les moyens. Or aucun ministre récent n’a su dire : « je crois que tous les jeunes dans ce pays ont les capacités de trouver leur place dans ce pays et de créer de la valeur ». C’est un tout petit changement de perspective, mais qui permet aux individus de se sentir responsables de l’avenir de leur pays.